Portrait de Kin-Fo:

Roman “Les Tribulations d’un Chinois en Chine” de Jules Verne (Livre de Poche – ISBN 2-253-01274-2) – extrait p6 et 7

 

Note : Kin-Fo est appelé dans le texte qui suit “l’amphitryon”.

 

Ce fut alors que le premier convive s’adressa directement à l’amphitryon, qui occupait le haut bout de la table, c’est à dire la plus mauvaise place, ainsi que l’exigeaient les lois de la politesse. Indifférent et distrait, celui-ci écoutait sans rien dire toute cette dissertation inter pocula.

“Voyons ! Que pense notre hôte des ces divagations après boire ? Trouve-t-il aujourd’hui l’existence bonne ou mauvaise ?Est-il pour ou contre ?”

L’amphitryon croquait nonchalamment quelques pépins de pastèque; il se contenta, pour toute réponse, d’avancer dédaigneusement les lèvres, en homme qui semble ne prendre intérêt à rien.

“Peuh ! ” fit-il.

C’est par excellence, le mot des indifférents. Il dit tout et ne dit rien. Il est de toutes les langues, et doit figurer dans tous les dictionnaires du globe. C’est une moue articulée.

Les cinq convives que traitait cet ennuyé le pressèrent alors d’arguments, chacun en faveur de sa thèse. On voulait avoir son opinion. Il se défendit d’abord de répondre, et finit par affirmer que la vie n’avait ni bon ni mauvais.

A son sens, c’était une “invention” assez insignifiante, peu réjouissante en somme !